Larshaen

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Cry Havoc Nr. 6. Page 74-78.
Installé dans la pièce d’études de celui qui avait éveillé son intérêt pour les vestiges du passé, Mehöl se redressa en prenant une longue inspiration. Il s’ébroua et posa son masque devant lui. Larshaen l’observait de ses yeux noirs pétillants de malice, mais pour l’heure, son visage était soucieux. Assis en tailleur à même le sol, maître et disciple se faisaient face dans le calme d’une alcôve baignée par la douce lueur d’un cocon de sapharantes. Larshaen se releva souplement et partit s’affairer dans un coin de la pièce. Un bruit d’eau mise à chauffer s’éleva bientôt. Promenant son regard sur l’improbable collection d’objets assemblés dans la salle, Mehöl savoura en silence la quiétude de l’endroit. Il aperçut çà et là des trouvailles, reconnaissant celles qu’il avait lui-même rapportées. Des étagères supportaient, pêle-mêle, statuettes, armes, crânes et autres objets insolites… Le tout donnait une impression de capharnaüm. Toutefois, pour un œil averti, chaque emplacement était soigneusement répertorié et disposé selon sa région d’origine. L’aspect hétéroclite provenait de la multitude de peuples qui avaient foulé les mêmes terres à travers les âges. À des chercheurs de Kallienne qui s’étonnaient du manque de rigueur d’un tel rangement, Larshaen avait répondu en souriant qu’en les triant, on privait les objets de leur histoire. Mehöl percevait lui-même les destins que racontaient ces trouvailles. Son œil y décelait les traces du métissage ou des alliances, ainsi que les influences croisées dont ces fragments du quotidien témoignaient. Absents du lieu, les écrits accumulés sur les origines des peuples étaient présentés dans une aile de la grande bibliothèque, afin que les érudits de toutes contrées puissent les consulter. Larshaen, qui œuvrait à cette tâche depuis une cinquantaine d’années, avait gagné la considération de ses pairs pour la somme d’ouvrages qu’il avait collectée et traduite. Ses pairs le laissaient donc s’adonner à sa quête d’objets, jugée futile par beaucoup mais tolérée au sein de l’Université comme un mode original de compréhension des peuples. La voix mélodieuse de son maître interrompit la réflexion de Mehöl.
— Es-tu prêt à reprendre l’ënalërosÿn ?

Il posa à même le sol deux tasses fumantes disposées sur un plateau. Le parfum épicé de l’infusion de fleurs d’étoile emplit rapidement l’alcôve. Mehöl but à lentes gorgées, prolongeant cet instant de répit. L’ënalërosÿn, le chemin de conscience, durait déjà depuis plusieurs heures. Mehöl était épuisé. Il caressa la surface lisse de son masque, relié par un câble à une sphère de cristal. Le masque ouvragé de Larshaen reposait face au sien, relié de la même manière. Au milieu reposait la masse cristalline de la mnémolabre, étrange carapace révélant des dizaines de replis sinueux lovés autour des points d’ancrage. Larshaen avait rarement eu recours à l’ënalërosÿn, car le respect et la confiance avaient tissé entre maître et disciple des liens qui permettaient de se passer de cet artifice. Les révélations de Mehöl l’avaient cependant convaincu d’y recourir. L’examen approfondi des derniers évènements vécus par son disciple permettrait d’analyser en détail les circonstances de sa découverte. Mehöl adressa à son maître un léger mouvement d’assentiment avant de rajuster son masque.
— Nous en étions au port du Kraken, reprit Larshaen.
Les images affluèrent, claires mais immatérielles, comme dans un rêve. Des images silencieuses, auxquelles Mehöl ajoutait parfois une description ou un commentaire. Il revit le quai vermoulu, le ciel gris de cette fin de journée et les premières lanternes qui s’allumaient aux fenêtres des tavernes du port. Suivirent les images fugaces d’un sordide agrégat de constructions précaires et d’épaves. Cet amas improbable, édifié sur les vestiges de l’ancienne cité cynwäll, composait le quartier flottant de Cadwallon.
— J’ai rendu visite à Dalrum. J’étais fourbu, mais il fallait que je rallie Wyde sans tarder, commenta Mehöl.
Plusieurs cotres aux voiles rapiécées amarrés à un ponton apparurent, l’un d’eux marqué d’une tête de sanglier grossièrement peinte. Deux matelots au teint hâlé y enroulaient des cordages. La vision des deux hommes se fit plus nette ; Mehöl était sur le bateau. L’un des deux marins, le plus petit à la calvitie naissante, grimaça à son attention et parla.
— Je leur ai demandé où était leur capitaine… ils ne voulaient pas le réveiller. Ils… La voix de Mehöl prit un ton rocailleux. On t’a dit que le capitaine veut pas d’visites, autant mettre la tête dans un trou de murène plutôt que de l’déranger.
L’autre marin, un natif de Kel au cou de taureau, s’avança pour repousser l’elfe…
— Reprenons le fil de l’histoire, as-tu vu le capitaine ?
Des images défilèrent rapidement, puis le capitaine surgit de la coursive du bateau, décochant un coup de pied au marin le plus proche. Il semblait mal réveillé, vociférant et frottant ses yeux porcins…
— Il était en colère après eux. Il a crié « bande de rats de cale à cervelles de seiches ! Pouvez pas fermer vos clapets, que je dorme ! Ou faut y que… »
— Merci pour cet exposé du langage fleuri des Cadwës du Kraken. S’est-il passé autre chose ?
Mehöl fit un effort de concentration.
— Nous avons négocié le prix de la traversée. Il a exigé un supplément pour l’urgence du départ… qui lui faisait perdre des affaires. Il m’en a coûté cinquante ducats. Les images du capitaine argumentant avec force gestes défilèrent. Larshaen se pencha vers Mehöl.
— L’or n’est rien. Ce que tu as ramené n’a pas de prix.
Larshaen se raidit. Il voyait une ombre qui en suivait une autre. La première de ces silhouettes sortit de l’obscurité.
— Il y a eu cette femme qui nous a dévisagés en passant… Elle suivait quelqu’un.
Un visage apparut, celui d’une femme au regard d’un bleu glacial, dérangeant. À cet instant, Larshaen posa une main sur le front de son aventureux disciple.
— Concentre-toi sur ce moment, sur l’instant où elle a surgi des ombres.
Mehöl déroula le fil de sa mémoire. Son esprit fouillait le passé.
— Dalrum se plaignait : « le quai est en basse chaîne à cette heure. Je risque des ennuis avec la capitainerie. Faut pas mécontenter ces gens-là. » Il s’est arrêté de parler. Je me suis retourné pour voir ce qu’il suivait ainsi du regard. Elle était là, une main crispée sur son épée. Derrière elle, il y avait une forme encapuchonnée qui, avant de s’enfoncer dans la nuit, nous a lancé un regard si… si froid. Cela m’a mis mal à l’aise. Excusez-moi pour ce manque de contrôle, maître.
— Ce n’est rien, répondit Larshaen d’une voix apaisante. Ne te tourmente pas. Tu as senti en elle l’empreinte de l’ombre qui la suivait. Vois. L’érudit prit un instant le contrôle du flot des souvenirs de Mehöl. Il remonta le cours tumultueux du temps et s’arrêta sur une image.
— Là !

La forme semblait glisser sur le quai et l’image se figea, révélant une langue serpentine dardée hors de la houppelande. Larshaen poursuivit.
— La Lumière te protège. Tu as croisé sans le savoir un ennemi bien plus dangereux que les Syhars dont tu me parlais tout à l’heure. Je me demande ce qui a pu pousser cette engeance dans la Cité des voleurs, murmura Larshaen, comme pour lui-même.
Les siens se cachent depuis si longtemps.
— Mais, revenons à ton voyage. As-tu fait d’autres rencontres ?
Mehöl reprit sa concentration. Des images fugitives du bateau et de la mer houleuse défilèrent devant ses yeux aux paupières closes.
— Non. Rien de notable. Par la suite, nous avons eu un vent favorable et j’ai pu accoster au sud du golfe de Syrlinh après trois jours de traversée. De là, j’ai suivi la route d’Aneirin
Wyde. L’image de la cité dominée par les tours fuselées de l’Université s’imposa aux deux Cynwälls. Les constructions de pierre blanche scintillaient dans la lumière de l’après-midi. Larshaen ôta son masque, rompant le contact avec le mnémolabre. Il semblait préoccupé. Mehöl se massa les tempes pour évacuer la tension. Il manquait de doigté dans cet exercice que d’autres Cynwälls pratiquaient quotidiennement. Son maître se releva, puis, se penchant vers lui, caressa les contours de l’implant qui ornait désormais sa nuque.
— Ainsi, tu abrites l’esprit d’un membre de l’Utopie, un gardien des légendes. Le silence s’installa, tandis qu’il regardait pensivement Mehöl. Veux-tu me montrer la clé qui t’a été confiée ?
Mehöl délaça sa tunique et dégagea le pendentif de bronze qu’il portait autour du cou. Larshaen le prit et se dirigea vers une table toute proche. S’emparant d’une loupe, il examina l’objet avec attention.
— Je n’ai rien vu de tel jusqu’ici.
Larshaen étudiait les encoches. Il distingua des marques à peine perceptibles. Aucune inscription. En tout cas, la facture confirme son origine. Larshaen soupira.
— Dans quoi t’ai-je entraîné, Mehöl ? J’ai fait preuve de légèreté en t’envoyant seul explorer cette contrée.
Mehöl se leva à son tour.
— Mais, maître, nous tenons là une formidable découverte, une confirmation éclatante de l’utilité de vos travaux sur l’origine du solaris et le savoir des Utopistes. Dans les visions de Kulden, j’ai vu des créations magnifiques, des constructs capables de se mouvoir dans les airs ou sous la mer !
— Certes, certes, répondit Larshaen d’une voix apaisante. Mais je mesure le poids de ce secret que tu portes dans ta chair.
Un secret ? Mehöl ne comprenait plus.
— Il faut révéler cette connaissance et la faire partager. Il faut en user pour repousser les Ténèbres. Nous avons entre nos mains la clé de certaines des créations des Sphinx.
Larshaen leva la main pour l’interrompre.
— Modère tes élans. Nous sommes certes en sous-sol et l’endroit est fort calme, mais je ne tiens pas à rameuter toute l’Université.
Se dirigeant vers la porte, Larshaen la referma, puis revint à son élève.
— Tu dois comprendre que la Vérité, telle la Lumière la plus éclatante, peut aveugler. Je sais que ces paroles pourraient être mal perçues, mais il m’importe que tu mesures l’ampleur de ce que tu détiens et du danger qui désormais t’accompagne. Depuis son exil, notre peuple est tourné vers la compréhension et l’harmonie par la Noësis, mais nous sommes à un tournant de notre histoire. Tu sais que, depuis Kaïber, notre Guide a décidé de réveiller d’antiques secrets. Nombre des nôtres pensent que nous ne devrions pas tirer ces savoirs mal maîtrisés de l’oubli. Ils sont partisans de l’Alliance de Lumière et refusent de s’en remettre à des « reliques », comme ils disent. Dans sa grande sagesse, l’allianwë ne veut négliger aucune possibilité dans la lutte contre les Ténèbres, mais sa vigilance est grande. Chaque découverte est soigneusement analysée et les tribëns s’y consacrent tout particulièrement. Parfois, lorsque la prudence le recommande, il leur est ordonné d’établir le secret le plus absolu et ce, même au prix d’une vie.
Larshaen garda le silence un instant. Il contempla son élève abasourdi avant de reprendre d’un ton plus léger.
— J’ai toute confiance en la clairvoyance du Guide. Il m’a laissé mener des travaux que beaucoup jugeaient inutiles et, aujourd’hui encore, grâce à toi, nous avons progressé dans notre connaissance des temps anciens. Quel dommage que ton hôte soit en torpeur ; j’aurais aimé m’entretenir avec lui sur bien des sujets.
Se levant, il saisit Mehöl par le bras avec douceur.
— Tu es épuisé et je suis un vieil idiot de te laisser ainsi, tandis que je rêve éveillé. Laisse-moi te mener à ta chambre, je me charge d’adresser un message à l’Omÿnsill pour solliciter une entrevue. D’ici là, repose-toi sans crainte dans ce lieu de paix. Efface tout de même cette empreinte des jours passés de ton masque, que nul ne puisse s’en emparer à ton insu.
Mehöl s’allongea habillé sur la couche sommaire. Il rumina les paroles de son maître en s’interrogeant sur ses mises en garde et ses sous-entendus. Son peuple avait fait de la transparence un principe fondateur. Le simple fait d’envisager de secrètes manœuvres au sein de la République, d’imaginer qu’on puisse violer l’intimité des souvenirs détenus par son masque, le troublait au plus haut point.

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